Une nouvelle de Valentine Mallat Desmortiers.

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L' Eveil,

une nouvelle de Valentine Mallat Desmortiers

Nous souhaitons à travers notre blog, mettre en lumière de jeunes auteurs,

Au plaisir des papilles s'ajoute celui des mots. Pour Baptiste Fournier, chef du restaurant Empreinte a Vannes, c'est le motif de l'empreinte que Valentine Mallat desmortiers nous déploie.

C'est un signe

J'ai rêvé d'un signe.

Pas le type de signe dont on fait l'ébauche au coin d'une feuille pour tromper l'ennui ou vérifier le niveau d'encre d'un feutre usagé. Je veux dire, pas une quelconque figure de géométrie qu'on peut retrouver dans les jouets pour enfants – de ceux qui éveillent la motricité.

Non. C'est un peu plus complexe que ça.

J'aurais bien du mal à le décrire, pourtant je le visualise très distinctement lorsque je ferme les yeux. Ça me prend quelques secondes, le temps que je m'accommode à la pénombre, et c'est comme s'il avait toujours été là : imprimé sur le négatif de ma rétine, sous l'écran de mes paupières.

La première chose qui me frappe, c'est la façon dont il se meut. C'est ça : je ferme les yeux, et dans l'obscurité dansent ses arabesques. Étrange sentiment de netteté devant une image aussi vaporeuse. Le trait scintille, fin et délicat, je l'imagine guidé par de minuscules compas au tracé simultané. Je pense compas et ça ne m'étonne pas : ce signe, il a des airs de rosace. Une rose sans épine, toute en rondeur.

Dans mon rêve, il marque chaque lieu que je traverse. Je le revois gravé sur le dossier d'une chaise en bois dont la peinture s'écaille ; apposé sur la céramique qui longe le couloir ; sculpté dans la poignée d'une porte entrouverte ; brodé dans l'ourlet d'une chemise en lin. 

Je révise mon itinéraire onirique et me surprend avec l'idée que, peut-être, puisque c'est un signe, il mène quelque part – mais où ? Peut-être, qu'il signifie quelque chose – mais quoi ?

Puis le rêve s'évanouit et m'échappe lestement comme il fait souvent au réveil. Ne restent que les photographies mentales éparses de ce signe qui pourrait tout autant ne se référer à rien que sortir tout droit d'un livre sur les sciences occultes.

Je m'étire longuement dans les draps froissés. L'air est lourd ; on est à l'aube de l'été. Le jour, dûment levé, s'étale sur la moquette en filtrant par l'interstice entre les volets. Je traîne le pas jusqu'à la fenêtre, fais grincer le battant, illumine, aère. Dans le ciel découvert, un couple de papillons blancs s'éloigne en tournoyant.

Un parfum d'huile chaude chatouille mes narines et m'invite en cuisine. Là, des légumes transpirent sous la supervision attentive de la mère. Je la salue d'un sourire las.

As-tu bien dormi ?

J'acquiesce sans pouvoir retenir un bâillement. L'horloge indique midi. Bientôt, je m’attelle à disposer la vaisselle en porcelaine (c'est dimanche) dans la salle à manger. La table parée, je m'assieds à ma place tandis que la mère dépose le plat sur la nappe. J'entreprends alors de nous servir distraitement quand, soudain, un détail attire mon attention : dans la rondelle, oui, là, à l'intérieur, enveloppant les pépins qui ont doré à la cuisson, regardez bien ! le signe dont j'ai rêvé. Oh, je n'invente rien – comment pourrais-je inventer quelque chose qui existe déjà ?

 
Valentine Mallat Desmortiers

crédit photo Louis Poulet

“Je me suis souvent demandée : à quoi ça ressemble, un auteur ? Au fur et à mesure des années, j'ai alimenté toute une imagerie poétique de l'activité de création. Je ne me figurais certainement pas une enfant aux cheveux sales, chaussettes jusqu'aux genoux sur pantalon de sport 13 % d'élasthanne 87 % polyester. Je me l'imaginais encore moins réciter ses textes contre le radiateur, ou à quatre pattes pour rebrancher l'ordinateur.”

*

Valentine a bientôt 25 ans et écrit depuis qu'elle en a 11. Quand elle n'est pas hôtesse de l'air ou apprentie romancière, elle étudie la sociologie à l'Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales après avoir obtenu un diplôme en Communication au CELSA Paris-Sorbonne.

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crédit photo

Guillemette Trognon


Sophie Masson

De son passé de styliste de mode, Sophie a gardé cette curiosité d’humer l’air du temps, de créer ses propres tendances, de mettre en place des collections. En marge de ce métier, elle suit une formation de décoratrice sur porcelaine. Passionnée, elle se perfectionne à Limoges et s'affirme auprès des professionnels et particuliers. L'envie d'aller plus loin, d'associer formes et décors devient une évidence, depuis elle dessine et façonne des services de table et objets à vivre en porcelaine, ou chaque pièce passée par le filtre de sa sensibilité devient objet unique et singulier.

Éditrice, elle personnalise à la demande de ses clients décorateurs, boutiques, ou particuliers toute porcelaine de lettrages, textes dessins slogans ou logos. Sophie invite des artistes à s’exprimer, ensemble ils réalisent des petites séries en porcelaine uniques, numérotées et signées.

Labellisée "Maisons de Mode" elle ouvre sa première boutique à Roubaix en 2017. La marque est aujourd'hui présente dans de nombreux points de vente en France et à l’étranger.

https://sophiemasson.com
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Sophie Masson Porcelaine gagnante du Prix Who’s Next 2020

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